Alain Portes : « La première impression est plutôt bonne »
Interview
Alain Portes - ©FF handball
Depuis juin, il a pris les rênes de l'équipe de France féminine de handball. La semaine passée, il a dirigé son premier regroupement avec, au menu, les deux premières rencontres qualificatives pour l'Euro 2014. L'occasion de découvrir les membres qui composent son collectif, de faire connaissance avec les joueuses, de commencer à instaurer son style, à poser sa patte. Deux victoires plus tard, et alors que le Mondial serbe pointe déjà le bout de son nez, Alain Portes, ancien sélectionneur de l'équipe masculine de Tunisie, a pris les choses à bras-le-corps et lancé l'équipe sur de bons rails. Entretien...
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Deux victoires sur ces deux premières rencontres de qualification à l’Euro 2014, c’est un début de campagne prometteur. Quels enseignements en avez-vous tiré ?
D’abord, c’était important de gagner ces deux matchs dans l’optique de la qualification pour l’Euro. Pour plein de raisons. Avant tout, parce que j’ai besoin de vivre des compétitions avec les filles pour les connaître et faire avancer cette équipe. La qualification est donc impérative et cela passait par ces victoires. Ensuite, la semaine que nous avons passée ensemble était toute aussi importante. Il s’agissait de notre premier contact. Ça y est, maintenant, je sais à qui j’ai affaire. Nous avons posé les règles de fonctionnement ensemble, les principes de jeu. Je trouve que nous avons bien avancé, plus peut-être que ce que je croyais. La première impression est plutôt bonne, sur l’état d’esprit en tout cas. Au niveau du handball, nous avons des choses à travailler, c’est évident, mais l’état d’esprit est excellent.
Vous avez intégré pas mal de jeunes au collectif. Que pensez-vous de cette nouvelle génération, en tout cas de celles que vous avez appelé en équipe de France ?
J’ai aussi été contraint de faire appel aux jeunes, à cause des indisponibilités de certaines, pour cause de blessure ou de maternité. Mais je trouve que c’était une bonne chose, qui nous a amené pas mal de fraîcheur et un peu d’insouciance dans l’équipe. Ces jeunes ont aussi apporté leurs qualités, différentes de celles des absentes. J’ai montré aussi que cela ne me faisait pas peur de lancer de nouvelles têtes, comme j’avais pu le faire lorsque que j’étais à la tête de la Tunisie, avec, je crois, un certain succès. Je ne sais pas si je vais toutes les rappeler la prochaine fois, mais celles-ci ont un temps d’avance sur les autres.
L’idée de m’occuper de cette équipe était très séduisante. (Alain Portes)
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Vous avez pris la succession d’Olivier Krumbholz, qui a occupé ce poste durant quinze ans… Comment avez-vous abordé ce rôle ?
Lorsque l’on a fait appel à moi, je n'ai pas regardé pas à qui j’allais succéder, mais ce que l’on me proposait. Et l’équipe de France, ça ne se refuse pas. Je n’ai même pas hésité, j’ai dit oui immédiatement. J’ai tout de suite été emballé. D’abord parce que j’avais été dans le handball féminin de nombreuses années, au sein du club de Nîmes, et que depuis je les suis attentivement. Je me suis même déplacé aux JO de Londres pour les voir jouer quand j’ai eu un peu de temps libre avec la Tunisie. Sans arrière-pensée d’ailleurs puisque je ne savais absolument pas ce qui allait m’arriver. L’idée de m’occuper de cette équipe était très séduisante.
Très concrètement, y a-t-il eu une transmission, une passation, d’effectuée avec Olivier Krumbholz ou n’y a-t-il eu aucun contact ?
La vérité se situe entre les deux. Je l’ai appelé, nous avons parlé. Pas immédiatement, pas à chaud. Je lui ai redit ce que j’avais dit dans la presse, à savoir que j’avais beaucoup d’estime pour ce qu’il avait accompli et lui m’a réaffirmé que j’aurai son soutien. C’était un échange très sympathique. Nous nous sommes également croisés à Toulon lors d’une rencontre qu’il commentait. Les rapports sont bons et il n’y a aucun souci entre nous. J’ai beaucoup de respect et si je n’ai pas plus communiqué avec lui, c’est d’abord parce que j’espère le faire dans quelques temps, mais c’est aussi parce que je veux me faire ma propre opinion des filles, sans être influencé par ce que l’on aurait pu me dire.
Pour moi, la priorité c’est le collectif. (Alain Portes)
Quelle est votre philosophie et quel est le discours que vous voulez faire passer auprès des joueuses ?
Je leur ai exposé dès la première réunion et je l’ai expliqué aux « anciennes » lorsque je suis allé les voir avant ce stage, au sein de leur club respectif… Pour moi, la priorité c’est le collectif. Les états d’âme personnels doivent être mis de côté au maximum. L’intérêt de l’équipe avant tout. Je leur ai dit que je souhaitais qu’elles prennent du plaisir, qu’elles se libèrent, que je trouvais qu’elles semblaient crispées depuis un an et que j’allais les aider à les décontracter en les protégeant. Elles ont le droit de faire des contre-performances individuelles et de ne pas être bonnes… à la condition toutefois qu'elles aient tout mis en œuvre pour l’être. Sur le style de jeu, j’ai aussi mes idées. J’ai déjà amené pas mal de choses sur ce premier regroupement. Ça crée la curiosité…
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Quelles filles vous ont marqué dans cette première approche avec l’équipe et sur lesquelles vous souhaitez vous appuyer pour construire votre ossature ?
Je n’ai aucun regret d’avoir confié le brassard à Siraba Dembele par exemple. Elle a pris les choses en mains avec discrétion et efficacité et elle me rejoint sur les valeurs que je veux mettre en place. Elle remplit très bien ce rôle. Je n’ai envie de retirer personne en fait. Toutes les « anciennes », comme Nina Kanto, Alexandra Lacrabère, Amandine Leynaud, Paule Baudouin, etc… ont été super sur ces deux rencontres. Que ce soit dans l’attitude avec les jeunes ou dans leurs performances. J’ai aimé l’écoute des jeunes, leur souci de comprendre vite ce que l’on attendait d’elles. Le message est bien passé, elles ont tenté, elles ont osé. Tout cela fait que nous avons tous pris, je crois, beaucoup de plaisir cette semaine.
Le Mondial en Serbie se profile, du 7 au 22 décembre. Avez-vous un objectif précis ?
Non, vraiment pas. Au début du championnat du monde, j’aurai eu les filles en tout et pour tout trois semaines à peine et nous aurons disputé cinq matchs. C’est trop peu pour mettre ma patte sur cette équipe, même si ça commence bien. Un Mondial, c’est quand même une autre dimension. Il est difficile de se projeter sur un résultat. Je dois déjà voir si je récupère des « anciennes » ou pas. Je suis plutôt dans mes petits souliers, même si j’ai très envie de faire un bon parcours. J’ai déjà envie de passer le premier tour et d’enchaîner derrière.
Quel est votre meilleur souvenir handballistique ?
C’est difficile comme question, difficile d’en dégager un. Il y en a plein. La médaille de bronze aux JO de Barcelone, en 1992. C’était ma fin de carrière en plus, il y avait donc une sensation particulière. J’en ai eu des superbes avec mon club aussi, comme mon premier titre en 1988, ou une rencontre dans les arènes de Nîmes avec 9500 spectateurs et une ambiance folle. Ce sont des moments forts dans une carrière.
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